KOB I VENTO

KOB I VENTO "LISBETH BUMPKIN EP" (COFIDISCS / MANGEDISQUE )

Break-beats dépouillés, basses sourdes, mélodies dilatées et vocaux élastiques deviennent les matières premières d’un electronica hip-hop décomplexé mélodieusement serti dans les Pyrénées voisines. Kob I Vento transpose la litanie rugueuse de la vie urbaine dans des paysages de cartes postales jaunies. Les sonorités rêches des cascadeurs électroniques crépitent aux sons des lucioles numérisées et des cigales pixelisées. Emballante promenade au couché de soleil, « Lisbeth Bumpkin » nous détourne des chemins de goudron balisés de nos villes pour nous faire perdre pied dans cette chorégraphie fantomatique des grands arbres. La musique sombre et envoûtante tourne sans cesse sur elle-même à nous donner le vertige, nous propulse au milieu d’une ronde frénétique où le blues souffle dans les feuilles.

JAGA JAZZIST

JAGA JAZZIST « MAGAZINE » (SMALLTOWN SUPERSOUND / Chronowax)

Minuit. Sur le pont, le dernier tramway de la journée s’ébranle vers le terminus. C’est dans l’obscurité que l’équipe de Jaga Jazzist se dirige vers la rue des clubs de jazz d’Oslo, écoutant la cité qui s’endort. Eclairée par une pauvre ampoule fatiguée, l’enseigne en forme de Sax fait figure de vestige. Ré-édition du maxi sorti initialement en 98, « Magazine » conjugue pop et jazz, vibraphone et programmation, saxophone et guitare, sur des instrumentations élastiques (à noter en bonus deux remixs drum’n’bass et orchestral ). L’écriture d’orfèvre s’approprie la couleur jaunie des murs enfumés, les ambiances sombres des cartes postales représentant les clubs d’Indianapolis et de New-York.

KIM HIORTH∅Y

KIM HIORTH∅Y « HOPENESS EP» (SMALLTOWN SUPERSOUND / Chronowax)
Bleeps disparates et rythmique breakbeat minimale, virus pop et ritournelle electronica, « hopeness » s’invente un itinéraire bis entre poussières astrales non identifiées et sonorités rondes des instruments classiques. Musique des bois et du vent, pièces montées au piano, mélodie du bonheur mariant pixel et molécules, Kim se plait à distordre les conventions et les boucles avec une dichotomie mordante, entre symétrie et décalage, entre ambiances jazz classiques et spirales vacantes. Se baladant entre les travaux de Pierre Bastien et Morgan Geist , Jaga Jazzist et Phil Ranelin, Boards of Canada et Four Tet, Mandarinerna, Soliga Dagens ou encore You know the score se transforment rapidement en comptines indispensables sortis tout droit de paysages mentaux et d’images virtuelles. Superbe

SUPERSOUL

SUPERSOUL « 45 » ( Metatronix / Chica-Chic)
Pyromane de la scène hip-hop from Miami, Supersoul (présent sur la compilation Lexoleum) n’a que faire des paillettes de la cité, préférant la démarche d’Anticon à la pose estampillée Grammy Awards. « 45 », blindé old scholl tant dans ses beats que sans son flow, dégaine avec sa horde biberonnée au ragga phat beat. La détonation de l’intro annonce le début des festivités, le visuel militaire couleur sable rappelle l’imagerie des Public Enemy. Le tribun jamaïquain en profite pour remettre les pendules à l’heure, la politique américaine se retrouve au piquet, en compagnie des branleurs prêts à tout pour stariser. Une vraie leçon de « real hip hop » que l’on se fera une joie de mixer avec les frères de sillons de The Bug.

JAGGA JAZZIST

JAGGA JAZZIST « DAY » (Ninja Tunes)
Les JAGGA impliqués dans le dernier FUNKSTORUNG (on retrouve quelques’uns des artistes crédités), n’ont pas pour autant laissé se liquéfier l’engouement les concernant et se sont offerts le luxe d’un remix d’Herbert et des lillois de Dat Politics. En quelques secondes, le décor est planté et l’on reconnaît automatiquement le trublion avec sa série de crépitements sonores. Bleeps disparates et rythmique house minimale, « Day » se transforme en morceau idéal pour repartir de plus belle la dure journée de labeur finie : un havre de paix pour la tête, un labyrinthe pour le corps entre poussières astrales non identifiées et sonorités non aseptisées. Les Dat Politics ne font pas pale allure et griffonnent avec malice et intelligence avant l’affront des kuters. Cela pétille, dérape.. Nickel. Enfin on écoutera en boucle, le sommeil venu, Two Things, C'est un peu avoir la tête dans les étoiles en écoutant un vieux Sakamoto..

AGF

AGF « DELAYONMYPILLOW » (Mixer / Toolbox)

Morceau unique de 20 minutes, Delay… est construit comme une prise son de corridors. Un couloir de vent où voix et sons se faufilent dans des jeux de matières. Mélodies étirées sur la trame d'un rituel ambient. Dans les couloirs d’un grand hôtel, entre ciel et terre, nous rencontrons d’étranges personnages, des couples passionnés. Des chambres viennent des brides de conversations et des répliques de vieux films en noir et blanc. AGF, micro en main, travaille l'écho de cet environnement molletonné couleur pourpre et scintillant de dorures usées. La moquette murale lui compte les anecdotes, les rideaux se font reflet de visages oubliés. AGF propose la musique, à vous d’en imaginer l’histoire..

DOCKNUKE.COM

DOCKNUKE.COM « Vaseline Windmills » (Rice and Beans / Chica Chic)

L’énervé du bocal Otto V.S. se déguise en Docknuke.com pour vociférer sur l’ennemi Bush. Pochette paramilitaire, statut de la Liberté en miette, il prend en otage les breakbeats furieux pour les transformer en musique de résistance anti politique américaine. Les rythmiques tombent en piquet dans une surenchère de filtres. La drill’n’bass claque comme des mines personnelles sur des relances hardcore. Résonnant comme un freestyle scandé à la frontière de territoires occupés, ce maxi, aussi stupéfiant qu’épuisant, est nourri de promesses de vengeance. Entre guerre et guerilla, Bush est dans la merde… Encore une réussite que l’on doit aux infatigables activistes underground du Beta Miami Crew.

BILL WELLS

BILL WELLS W/ GUESTS « Pick Up Sticks » (Leaf /Chronowax)

Bill Wells s’enferme en studio avec Stefan Schneider de To Rococo Rot, la tromboniste Annie Whitehead et Barbara Morgenstern . Attend cinq jours et écoute. « Pick Up Sticks » s'évade entre Velvet lunaire et les harmonies luxurieuses de Tarwater, les sonorités restent dans l’air comme des bulles filant dans les rues berlinoises. Filatures virtuelles, Bill Wells et ses compagnons de route proposent une promenade fiction aux atmosphères crépusculaires. Mélancolie aux reflets éblouissants, fascinante rhétorique minimale, la musique interfère collages ambiants, jazz cotonneux et post-rock maquillé. Un jam unique en apesanteur..

GROUPGRIS

GROUPGRIS « TOPS SHOKS, SOUVENIRS » (WWILKO / Mangedisque)
De la polka dégoupillée dans un fatras de breakbeats loufoques, Eminem épinglé par les Jakass sur le mur des pitreries, euro-dance et country bootleeguées comme on prépare un vol à l'étalage… Avec ses fastes punk'n'roll et ses dérives 8bits, ses apparats alternatifs et ses plans garage, Groupgris déboule avec son attirail de malfrat granulaire. Chahutant le casting incendiaire des hits electro, torturant la matière musicale à l’image de Tigerbeat6 ou Rephlex, Orion écorche sur les infrabasses d’un breakbeat de ferronnier ses désirs dévastateurs. Résultat : « Tops Shoks , Souvenirs.. » arme fatale et ludique pour rendre définitivement fou les aficionados de ses prestations détonantes avec KHIMA France sous le nom de KAP BAMBINO.. Impeccable danse aux accords déviants

O.LAMM & SUTEKH

O.LAMM & SUTEKH « Six residua » (Active Suspension)
Paysages sonores étranges, bancals et dansants, ce split single « Six Residua » donne le ton de cette scène au Carrefour d’influences. O.Lamm et Sutekh donnent toute la mesure de leur talent respectif dans cet exercice de remix. Références noise et minimalisme de rigueur,. Ils s'efforcent de garder cette lumière minimal tech rarement aussi bien utilisée auparavant dans les recoins de cette face expérimentale, ils éclairent la situation sous un angle parfois énigmatique avant de nous projeter dans un univers musical au goût mêlé de beauté pop et de shoegazing inachevé. Patchwrok épique (le second morceau faisant plus de 20 minutes), entre les guitares scintillantes de Boo Radleys, les effets aquatiques de The Orb et le groove ripé d’Isolé, les deux protagonistes n’oublient jamais le côté ludique de leur recherche. Une réussite.

KOMORI / TORZ R ME

KOMORI / TORZ R ME (Rolax / Discograph)
Voilà un bien beau split single ! Ami des danses bancales à l'électricité contagieuse, réjouissez-vous. Voici un jeune label français digne héritier de Rephlex et Worm Interface… Komori et Torz R Me pourrait bien être le petit canard noir de la basse-cour electro frenchie. Place quelque peu disputée avec Teamtendo certes, mais là où ceux-ci plantent leur game-boys vérolées, les deux balancent breakbeat plein gaz. Tous les gimmicks indispensables à la bonne conduite d'un dancefloor voué à la cause d’Ovuca sont réunis. Electronica loufoque accouplé à un post-rock d’Atari, breakbeats compulsifs montés sur un Bontempi, cette troisième référence boucle le bec aux rois de la "défonce pour de rire" pour balancer un coût de speed pour remuer la scène locale. Et lorsque l’on apprend que Rolax est plus qu’un label mais un vrai collectif associant musique , images, vidéo, on ne peut qu’attendre la prochaine soirée du Crew…

SIXTOO

SIXTOO « BOXCUTTER EMPORIUM » (NINJA TUNE)
Accompagné de Damo Suzuki membre de Can, Sixtoo ouvre la boîte à souvenirs. Riche en références, terrain de jeux construit sur les ruines du Mur, « Boxcutter Emporium » définit sa propre cinéphile , cadrant dans un décor déjanté de chansons surexposées et de thèmes électroniques et hip-hop au haut volume sonore. Contorsions hip-hop, post punk de pixels, « Storm clouds… » assomme par sa vision inédite d’un western nourris d’angoisses, d’hommes enfermés, et d’âmes mortes accrochées aux cactus. Guère de repères, ou trop, on se jette sur les albums de Birthday Party, sur le catalogue de Mush, pour imaginer la bande son de l ‘ « harmoica man »

THE KAT COSM

THE KAT COSM « KNIGHTBOAT » (KLANGKREIG / STAUBGOLD / Chronowax)
On serait bien tenter d’imiter l’homme de la pochette. Tout lâcher , le stress, la grisaille, les intermittents de la franchise, les prétentieux et les impatiens. Prendre la poudre d’escampette, sans laisser d’adresse e-mail , pour se mettre au vert au bord de la rivière. Là sur un ponton vieillot, on ferai une pause en compagnie de Red House Painters et Fingernail. On s’installerai pour écouter en compagnie de Lexaunculpt (responsable d’un remix) la musique du vent balayant la végétation paisible mais bien plus vivante que mon voisin de métro.. Voilà une très belle réussite ! Parfait adage de classique pop et de manipulation électronique, « Knightboat » réjouit. Régulièrement la mixture s’enlise, ici on prend le large…